Ce n’est rien de moins qu’un bouleversement des pratiques qui s’est opéré dans l’industrie musical avec l’arrivée des technologie numériques. Dans la dernière décennie, les travailleurs et travailleuses de la musique ont dû s’adapter à l’émergence du numérique pour continuer de performer leur art. Une façon de s’adapter à la transition numérique serait d’encourager la formation initiale et continue des personnes qui œuvrent dans ce secteur. Il y aurait, en effet, une impression de sous-formation par les artistes musicaux au Québec (un constat qui s’étend probablement à toutes les provinces et à tous les territoires). Pourtant, un rapide panorama permet de constater l’énorme offre éducative qui existe dans la province pour former les professionnel·les du milieu. Comment alors expliquer ce décalage entre la sous-formation observée et la grande offre de formation? Est-ce que ces formations sont pertinentes? Où se forment les professionnel·les du milieu musical? Et surtout, comment les PDC peuvent les soutenir?
Afin de trouver réponse à ces questions, une équipe de recherche a tenté de comprendre le rapport des travailleurs et travailleuses de la musique au paysage de formation québécois et, plus largement, les effets du numérique sur les carrières en musique. Martet, Lussier et Bélanger ont mené des entretiens de longue durée avec 10 participant·es, dont la moitié se sont déclarés autodidactes (c’est-à-dire sans cursus initial en musique).
Un élément de réflexion qui revient chez toutes les personnes participantes est la remise en question des formations initiales offertes par les institutions. Elles ne croient pas que les formations plus traditionnelles arrivent à se tenir à jour sur les besoins du milieu. Ce doute est fondé sur trois arguments soulevés par les participant·es et qui sont en lien avec la complexité de leur métier :
- l’impossibilité ressentie d’enseigner les tâches concrètes de leur métier;
- la préférence pour des échanges au sein de communautés de pairs;
- la rapidité avec laquelle les outils numériques en création, en gestion ou en réseautage social changent, voire deviennent obsolètes.
Afin de pallier les complexités de leur métier et les lacunes repérées par les personnes participantes quant à la formation initiale en musique, l’autoformation est souvent considérée comme une voie de choix. Celle-ci est souvent priorisée par rapport à la formation initiale, même par des personnes ayant un plus long parcours académique. Martet, Lussier et Bélanger observent trois voies d’autoformations empruntées par les travailleur·euses de la musique :
- l’expérience et la formation en autodidacte par essai/erreur;
- les communautés de pratiques et le partage de connaissances avec les pairs;
- le recours aux ressources en ligne.
Dans ce contexte, la formation dans les métiers de la musique n’est plus considérée comme une étape de préparation au travail. Elle devient plutôt une partie continue du travail qui est accomplie de façon ponctuelle selon les besoins des projets en cours (ex. formation technique aux outils de création, formation au travail en équipe, formation en administration, formation en gestion des réseaux sociaux). La « crise » que connait l’industrie musicale en raison du virage numérique semble donc liée au besoin de s’orienter dans tous les choix de formation possibles, autant formelles qu’informelles – un besoin auquel peuvent répondre les PDC pour soutenir les travailleurs et travailleuses de la musique.
Responses